L’accès à la culture est en pleine transformation
En l’espace d’une génération, l’émergence du numérique a considérablement fait évoluer nos manières d’écouter de la musique, de lire, de regarder un film ou encore de jouer. À tel point qu’aujourd’hui, l’essentiel des données consommées sur Internet correspond à des contenus culturels. Selon le Shift Project, la culture constituerait ainsi le premier poste mondial de consommation de données et représenterait plus de 1 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Lire un livre papier serait-il dès lors préférable à une lecture sur liseuse ou tablette ? Jouer à un jeu vidéo hébergé sur un serveur distant est-il au contraire un progrès comparé aux jeux sur CD-ROM ou disque ? Pas si simple tant l’impact environnemental d’un service culturel, qu’il soit digital ou physique, dépend en grande partie de nos usages. C’est ce qui ressort d’une étude de l’ADEME sur les impacts des services culturels.
Livre ou liseuse ?
On pointe souvent du doigt les impacts du papier. Pourtant, lire un roman de 300 pages sur papier représente une empreinte carbone près de 10 fois moins importante que sa lecture sur liseuse ou tablette. Étonnant ? Oui, si l’on ne prend en compte que la transmission des données, correspondant au téléchargement d’un livre d’environ 3 Mo. Mais il faut aussi prendre en compte la fabrication, le transport et la fin vie des liseuses et tablettes. Autant d’éléments qui pèsent lourd sur la balance environnementale.
Comment limiter les impacts des liseuses et tablettes ?
- faites durer vos équipements ;
- n’achetez une liseuse que si vous êtes un gros lecteur. Sachez qu’il faut en effet lire au moins 50 livres sur liseuse pour que chaque livre supplémentaire ait moins d’impact carbone que le format papier neuf et même davantage si l’on prend pour comparaison la lecture d’un livre d’occasion.
Comment limiter les impacts du livre papier ?
- privilégiez les livres de poche : le format nécessite environ 37 % de papier en moins ;
- revendez ou donnez les livres dont vous n’avez plus l’utilité et achetez d’occasion : tous ces actes participent à amortir les impacts.
CD ou écoute en streaming ?
Difficile ici de donner la préférence à l’une ou l’autre solution. Principalement parce qu’elles nécessitent toutes deux des équipements que nous possédons tous plus ou moins : une chaine hi-fi et un smartphone par exemple.
Le CD a potentiellement de vrais impacts. Mais il a aussi pour lui d’avoir une durée de vie assez longue, ce qui les amortit considérablement. On peut le conserver et l’écouter pendant des dizaines d’années. Lorsque l’on s’en lasse, on peut aussi le donner ou le revendre.
Les principaux impacts de l’écoute numérique sont quant à eux dus à la fabrication, au transport et au traitement en fin de vie des équipements. Si vous écoutez de la musique en streaming sur smartphone avec une enceinte connectée, le smartphone et l’enceinte représenteront respectivement 56 % et 41 % de l’impact global du service sur le changement climatique. C’est pourquoi il est préférable d’éviter de multiplier les équipements (smartphone + enceinte connectée + chaine Hi-Fi…). Et de les renouveler trop souvent.
Pour limiter les impacts de la transmission de données en cas d’écoute en streaming :
- privilégiez le wifi, voire l’ethernet, plutôt que la 4G ;
- choisissez une qualité audio plus faible ;
- téléchargez vos morceaux préférés, c’est 3 % d’impacts en moins.
DVD ou vidéo en ligne ?
Regarder un film sur DVD a un impact prépondérant qui s’amoindrit à mesure des visionnages : de 2 h à 8 h d’utilisation, son empreinte carbone varie de 389 à 128 g de CO2eq par heure. Pour l’achat d’un DVD, il vaut ainsi mieux s’en tenir aux films que vous serez certains d’avoir envie de regarder et de re-regarder sans vous lasser. Et là encore, pensez au don ou à la revente si vous souhaitez vous en séparer.
Pour mesurer les impacts du visionnage d’un film en ligne, les équipements utilisés (TV + box TV, ordinateur, smartphone) comptent beaucoup : ils représentent 65 % (38 % pour le smartphone) de l’impact global sur le changement climatique. L’échange de données, nécessitant le fonctionnement de réseaux et de datacenters, pèse également lourd. Mais il y a, là encore, quelques bonnes habitudes à prendre :
- baissez la résolution en fonction de l’appareil que vous utilisez et de ce que vous regardez. Un mini-reportage visionné sur smartphone ne nécessite peut-être pas la qualité vidéo optimale. En fonction de votre paramétrage, l’impact du streaming sur TV varie entre 59 et 116 g de CO2eq par heure, celui du streaming sur ordinateur portable entre 53 et 110 g de CO2eq par heure, et celui du streaming sur smartphone entre 26 et 83 g de CO2eq par heure ;
- si vous regardez un film sur votre smartphone : choisissez le wifi plutôt que la 4G.
Jeux sur consoles / ordinateurs ou avec le Cloud ?
Là encore, ce sont les équipements qui concentrent la majeure partie des impacts. Une console représente en effet 80 % des impacts du jeu sur le changement climatique. Le CD ou le téléchargement du jeu aura quant à lui un impact relativement faible qui sera amorti au bout de 182 heures, ce qui excède considérablement la durée effective de jeu d’un grand nombre de références aujourd’hui sur le marché.
Dans le cas où vous privilégiez le format physique (disque ou CD-ROM), mieux vaut donc vous en tenir aux jeux qui offrent un long temps de jeu. Comment le savoir ? Le site How Long To Beat vous indique le temps moyen nécessaire pour finir l'histoire principale de plus 30 000 vidéos. Vous pouvez aussi diminuer votre impact en achetant des jeux d’occasion qui ont déjà été utilisés par d’autres joueurs. En augmentant leur durée de vie, vous contribuez à amortir les impacts du CD.
Pour le reste, c’est en jouant sur ordinateur portable à un jeu téléchargé que votre impact environnemental sera le plus faible. Pourquoi ? Parce qu’un seul équipement est ici nécessaire, a contrario du gaming sur console ou sur box tv qui nécessite aussi l’emploi d’une télévision.
Enfin, on voit apparaitre un nouveau type de service : le Cloud gaming. Il consiste à déporter la puissance de calcul dans les datacenters, plutôt que chez l’utilisateur. Cette option peut éventuellement permettre à l’utilisateur de se passer de console.
Quelques indications sur ce type de jeu :
- pour un jeu avec une taille importante (77 Go), le Cloud gaming peut s’avérer potentiellement moins impactant par heure de jeu qu’un jeu téléchargé, si le jeu n’est joué que quelques heures (en dessous de 6 heures) ;
- pour un jeu plus léger (6 Go), le point de bascule se situe cette fois-ci à 1,5 heure de temps de jeu total.
Allonger la durée de vie des équipements numériques : un impératif
Tous ces résultats confirment l’importance de ne pas nous suréquiper ou d’allonger la durée de vie de l’ensemble des équipements qui facilitent nos usages numériques : liseuses et tablettes, ordinateurs, smartphones, consoles ou téléviseurs.