Conseil
Construire l’avenir de son territoire
Les bouleversements climatiques, géopolitiques et socio-économiques accroissent les incertitudes auxquelles sont confrontées les collectivités. Face à l’ampleur des mutations, il est essentiel d’expérimenter, d’innover et de s’appuyer sur les avancées scientifiques pour renforcer le dialogue et bâtir des stratégies solides.
POUR QUI ? Élus locaux
En tant qu’élu, je peux…
- Expérimenter localement une solution innovante sur un sujet d’intérêt pour la commune (urbanisme, mobilités, agriculture, etc.), en intégrant un projet de recherche-action participative.
- Participer à une étude prospective pour anticiper les risques et opportunités auxquels le territoire devra faire face d’ici 2050.
- Organiser des ateliers de concertation avec les habitants pour recueillir leurs visions d’un avenir souhaitable à moyen et long terme pour le territoire.
- Cofinancer et suivre le travail de recherche d’un doctorant sur un enjeu prioritaire pour le territoire, en partenariat avec des établissements d’enseignement supérieur.
- Organiser localement un cycle de conférences avec des chercheurs pour aider les habitants à renforcer leur culture scientifique.
Aménagement et planification : passez à l’action
Et en pratique, on peut…
Lancer une démarche prospective locale pour préparer l’avenir du territoire
On peut profiter d’une révision du PLU, du SCoT, du PCAET, d’un SAGE ou de la clôture d’un atlas de la biodiversité communale, par exemple, pour ouvrir une réflexion de long terme : analyser les grandes tendances, identifier les conséquences concrètes des bouleversements à venir (climatiques, économiques, démographiques, etc.) pour le territoire, et planifier les réponses à engager dès aujourd’hui ou à moyen et long terme.
On associe une diversité d’acteurs à la démarche : chercheurs, représentants de la société civile, agents de la collectivité, acteurs économiques et associatifs. L’implication d’artistes et d’acteurs du monde de la culture peut également être un atout pour ce type de démarches (on peut s’inspirer par exemple des démarches de territoire soutenues par le programme ÉRABLE). L’objectif est de « voir loin et voir large », en croisant les expertises et les regards pour enrichir les scénarios.
On implique l’ensemble des services et des élus dans le pilotage de la démarche, en prenant le temps nécessaire pour faire émerger une vision collective (prévoir entre 12 et 18 mois).
On associe les habitants via des ateliers de concertation, on engage une discussion autour de leurs aspirations et de leurs visions d’un futur souhaitable. On peut par exemple s’appuyer sur les scénarios Transition 2050 de l’ADEME, qui donnent à voir quatre chemins contrastés vers une France neutre en carbone en 2050.
Expérimenter de nouveaux modèles sur le territoire, en s’appuyant sur les acteurs de la recherche et les habitants
On participe à un consortium mêlant collectivités et scientifiques pour répondre à des appels à projets de recherche-action participative sur des thèmes prioritaires pour la collectivité. On mobilise aussi les acteurs associatifs ou économiques du territoire pertinents. Au besoin, on peut s’appuyer sur des organismes institutionnels de médiation, comme les boutiques des sciences, ou toutes autres structures rattachées à des universités ou centres de recherche, chargées de faciliter la coconstruction de projets de recherche-action participative.
Soutenir et orienter des travaux de recherche
On peut solliciter des étudiants en licence ou en master en lien avec leurs responsables pédagogiques pour commencer à qualifier les besoins, attentes et la faisabilité. On cofinance et on suit l’activité d’un doctorant (via une thèse CIFRE ou une thèse ADEME, par exemple) qui travaille sur un enjeu important/une spécificité pour le territoire.
Organiser des colloques, séminaires et ateliers
L’objectif consiste à permettre aux habitants de consolider leur culture scientifique, afin qu’ils tiennent compte des enseignements des recherches récentes dans leurs pratiques quotidiennes. Inciter les acteurs territoriaux à participer à des programmes de sciences participatives ou à s’impliquer dans des projets de recherche-action participative.
Ils le font déjà
Un comité citoyen pour penser la ville en 2050
Une commune en Bretagne – 11 000 habitants
Lancée en 2022 pour couvrir l’ensemble du mandat jusqu’en 2026, la démarche vise à anticiper les grands enjeux écologiques et sociaux à venir, en tenant compte des intérêts des générations futures et du vivant. Cette démarche inédite de démocratie prospective, animée par une vingtaine d’habitants volontaires dès 16 ans, a valu à la commune une reconnaissance nationale.
Imaginer demain autrement : la créativité au service du territoire
Une commune en Île-de-France – 8 430 habitants
Pour imaginer son avenir à l’horizon 2038, cette commune a mobilisé plus de 600 habitants dans une démarche participative inédite, mêlant théâtre-forum, ateliers dans les écoles, débats publics ou encore marchés d’idées organisés lors de fêtes locales. Portée par une volonté politique forte, cette dynamique a permis de toucher un public diversifié et de faire émerger des enjeux en matière de transition écologique, de lien social ou encore de cadre de vie. Le projet s’est conclu par un court-métrage participatif, co-écrit par des citoyens, des élus et des agents, projeté dans le cinéma de la commune.
S’appuyer sur la communauté scientifique locale pour reterritorialiser les filières agricoles et alimentaires
Une communauté de communes de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur – 29 000 habitants
L’intercommunalité a mobilisé pendant un an les élus, services techniques, entreprises et syndicats agricoles du territoire, afin de questionner le potentiel productif local et la possibilité de tendre vers l’autonomie et la souveraineté alimentaire. La communauté scientifique et l’ADEME ont d’abord aidé les élus et les services de la collectivité à exploiter l’état des lieux du système agri-alimentaire conduit (ressources, gisements, etc.). Puis une réflexion a été menée afin de réduire les impacts environnementaux des filières agricoles du territoire, tout en proposant une gouvernance alimentaire compatible avec la politique foncière locale.
Pourquoi est-il essentiel d’innover et d’expérimenter pour anticiper les transformations du territoire ?
- 60 % des élus français pensent qu’il faudra modifier de façon importante nos modes de vie pour limiter le changement climatique, contre seulement 10 % qui pensent que le progrès technique permettra de trouver des solutions
Source : ADEME, Les représentations sociales du changement climatique – 25ᵉ vague du baromètre, 2024 - 1,4 milliard d’euros dépensés au profit de l’enseignement supérieur et de la recherche en 2022, selon les collectivités territoriales. Les communes et les intercommunalités comptent pour environ ¼ de ces dépenses
Source : ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, le financement de la recherche et de l’enseignement supérieur par les collectivités territoriales entre 2020 et 2023, 2024
La transition écologique transforme en profondeur nos façons de consommer, de produire, de nous déplacer ou d’habiter, tandis que les bouleversements climatiques, géopolitiques et socio-économiques accroissent les incertitudes auxquelles sont confrontées les collectivités.
Maintenir un cap à long terme et inventer de nouveaux modèles de territoire nécessite par conséquent un dialogue nourri entre les élus, la société civile et le monde de la recherche et de l’enseignement.
Les scientifiques peuvent, malgré les incertitudes, apporter des repères sur les limites physiques, les risques et les trajectoires possibles, et contribuer à identifier des actions concrètes à engager, notamment en s’inspirant des retours d’expérience d’autres territoires. Les citoyens, les entreprises et les associations portent également une vision pour l’avenir du territoire qu’il est essentiel de partager collectivement. Ensemble, ils contribuent à dessiner des futurs souhaitables et crédibles pour la collectivité.
Par ailleurs, bon nombre de réponses classiques mises en place par les collectivités montrent aujourd’hui leurs limites face à l’ampleur des transformations en cours. Expérimenter et sortir des cadres établis, en tenant compte des dernières avancées de la connaissance, devient une nécessité pour continuer à améliorer le cadre de vie sans compromettre l’avenir du territoire, tout en accroissant sa résilience.
Dans cette perspective, renforcer le dialogue entre science, société et décision publique, à l’échelle locale, est un levier essentiel pour construire des stratégies de transition à la fois robustes, innovantes et adaptées aux spécificités de chaque territoire.
Des ressources utiles
- Étude et rapport – Transition(s) 2050 – l’exercice prospectif de l’ADEME
- Accompagnement et aide – Programme Érable